Cyanobacteries

Les cyanobactéries en questions

Les cyanobactéries se développent principalement en été dans des eaux comme les lacs, les étangs et certains cours d’eau et provoquent un changement de couleur de l’eau. Si elles se retrouvent naturellement dans les écosystèmes aquatiques, leur prolifération, conséquence d’un apport en nutriments trop important dans les lacs et les rivières, devient une préoccupation internationale croissante du fait des conséquences écologiques, sanitaires et économiques qu’elle entraîne. Décryptage d’une famille de bactéries qui fait de plus en plus parler d’elle.

Que sont les cyanobactéries ?

Les cyanobactéries sont des micro-organismes présentes sur Terre depuis deux à trois milliards d'années. Présentes dans le monde entier, dans les plantes, dans l'eau mais aussi dans le sable, elles façonnent notre planète.

Elles se développent dans les milieux terrestres et aquatiques, dans les eaux douces comme dans les eaux salées. Lorsque les conditions environnementales - température, nutriments - leur sont favorables, elles peuvent proliférer de manière massive et rapide, parfois en quelques jours seulement. On parle alors d’efflorescence. Dans certains cas, ces proliférations entraînent un changement de couleur de l’eau (rouge, vert, etc.), une odeur nauséabonde et/ou l’accumulation de cyanobactéries à la surface de l’eau.

Certaines espèces de cyanobactéries produisent des toxines appelées cyanotoxines. Les toxines les plus connues sont les microcystines, les nodularines, les cylindrospermopsines, les anatoxines, les saxitoxines et leurs dérivés.

En milieu aquatique, selon leur mode de vie, les cyanobactéries, se divisent en deux groupes :

  • les cyanobactéries planctoniques se maintiennent en suspension dans la colonne d’eau grâce à l’existence de vésicules gazeuses intracellulaires qui leur confèrent des propriétés de flottabilité ;
  • les cyanobactéries benthiques se développent au fond des cours d’eau, sur des substrats minéraux (blocs, galets, sable, sédiment, etc.), voire à la surface des plantes aquatiques.

Le saviez-vous ?

Les cyanobactéries sont les premiers organismes à avoir fabriqué de l'oxygène ! Ils ont permis l'existence de plusieurs formes de vie, dont l'espèce humaine.

Où et quand se développent-elles ?

Les cyanobactéries ont besoin de lumière, de chaleur et de nutriments pour se développer.  

Dans les zones tempérées, la prolifération de cyanobactéries survient plus souvent en été et début d’automne, mais on peut parfois les observer dès le printemps.

En France, les cyanobactéries prolifèrent entre le mois de mai et le mois d'octobre, dans des eaux calmes et riches en nutriments comme les lacs, les étangs et certains cours d’eau. Dans certains cas plus rares, des proliférations pérennes sont observées tout au long de l’année ou bien encore spécifiquement en hiver.

Sous les climats tropicaux et subtropicaux, comme dans les départements d’outre-mer, les proliférations peuvent être observées toute l’année si les conditions sont réunies pour leur développement.

De manière générale, des épisodes de prolifération de cyanobactéries sont observés de plus en plus fréquemment sur tous les continents.

Le saviez-vous ?

Les cyanobactéries ne sont pas des algues mais des bactéries. Pour se développer, elles doivent avoir accès aux mêmes substances nutritives que les végétaux : le phosphore et l’azote.

Quelles sont les conséquences de leur prolifération ?

La prolifération de cyanobactéries devient une préoccupation internationale croissante au regard des conséquences écologiques, sanitaires et économiques associées. En effet, les proliférations massives de cyanobactéries peuvent :

  • impacter la santé des écosystèmes. Des densités importantes de cyanobactéries peuvent altérer le fonctionnement des écosystèmes en conduisant à une désoxygénation de l’eau, entraînant une mortalité massive de poissons et d’invertébrés ;
  • à travers la production de cyanotoxines, représenter un risque pour la santé des humains et des animaux qui consomment de l’eau contaminée, qui sont en contact direct (à travers la baignade ou des activités nautiques par exemple) ou indirect (via la consommation de denrées animales ou végétales elles-mêmes contaminée) avec l’eau contaminée,. Des mortalités d’animaux, principalement des chiens, mais également parfois du bétail ou de la faune sauvage, ont été recensées ces dernières années à la suite d’exposition à des efflorescences de cyanobactéries productrices d’anatoxines ;
  • conduire à une limitation des usages aquatiques tels que la baignade, le nautisme ou la pêche liée à l’aspect repoussant des plans d’eau (modification de la couleur de l’eau, mauvaises odeurs, etc.). Les proliférations de cyanobactéries peuvent ainsi avoir des effets négatifs directs sur le tourisme en bordure des plans d’eau, accentués, le cas échéant, par les mesures de restrictions sanitaires des usages récréatifs.

Les cyanobactéries peuvent-elles être mortelles pour les humains ?

Dans certains cas extrêmement rares à ce jour, l’inhalation ou l’ingestion accidentelle de cyanobactéries peut être mortelle. Au Brésil, en 1996, 60 personnes atteintes d’insuffisance rénale sont décédées suite à une hémodialyse dont l’eau nécessaire à ce traitement était contaminée par des microcystines. Il s’agit des effets sur la santé humaine les plus sévères décrits provoqués par la toxicité de certaines cyanobactéries.

En France, à date, aucune intoxication humaine létale associée aux cyanotoxines n'a été enregistrée, notamment grâce aux contrôles sanitaires effectués dans les eaux destinées à la consommation humaine et sur les sites de baignade. En revanche, des épisodes de mortalités de chiens sont régulièrement attribués à des cyanotoxines depuis 2005.

Le saviez-vous ?

Le plus ancien cas d’intoxication humaine documenté mentionne la mort de soldats chinois ayant bu une eau verte en provenance d’une rivière il y a environ 1000 ans !

Quelles sont les voies d'exposition et les risques associés ?

Les cas d’intoxication humaine sont plus rares que les intoxications animales, notamment en raison de la maîtrise du risque d’exposition (contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine et des sites de baignade). Toutefois, l'exposition humaine aux cyanotoxines est possible par différentes voies dont les principales sont :

  • l'ingestion d'eau potable mal traitée ou d’eau non traitée (en particulier dans les pays du Sud) ;
  • l’inhalation, l’ingestion accidentelle d’eau ou le contact cutané avec des cyanobactéries et des cyanotoxines lors d'activités récréatives (aviron, ski nautique, canoë…) ;
  • la consommation de denrées végétales contaminées par l'eau d’irrigation ;
  • la consommation de denrées animales (poissons) provenant d'eaux contaminées ;
  • la prise orale de compléments alimentaires contaminés ;
  • la voie intraveineuse (hémodialyse).

Quelles que soient les voies d’exposition considérées, les symptômes les plus couramment reportés sont des symptômes gastro-intestinaux, des états fébriles et des irritations cutanées. L’ingestion ou l’inhalation de cyanobactéries peut également provoquer des toxicités hépatiques (problèmes au niveau du foie) et des neurotoxicités (tremblement, fourmillement, paralysie, etc.).

Les délais d’apparition des symptômes varient de quelques minutes voire quelques heures pour les symptômes cutanés et les troubles neurologiques, à plusieurs heures pour les toxines hépatiques.

En France, 95 cas d’intoxication humaine par des cyanobactéries ont été recensés par les centres antipoison entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2018. Ce nombre est probablement très sous-estimé du fait d’un manque de connaissance de ce phénomène par le grand public et de symptômes peu spécifiques, qui de plus peuvent disparaître rapidement et ne font pas nécessairement l’objet d’un signalement par la population aux médecins et autorités sanitaires.

Comment prévenir leur prolifération ?

Les proliférations de cyanobactéries planctoniques surviennent principalement dans les eaux stagnantes (plans d’eau et rivières très lentes) dans lesquelles il y a un apport excessif d'éléments nutritifs, entraînant une prolifération végétale, un appauvrissement en oxygène et un déséquilibre de l'écosystème.

Pour se développer, les cyanobactéries ont besoin de concentrations élevées en phosphore et en azote dont les apports peuvent avoir des origines multiples : effluents d’élevage, compost, boues de station de traitement des eaux usées, engrais épandus sur les sols, rejets d’eaux usées insuffisamment traités, lessivage des sols lors d’épisodes pluvieux importants.

La réduction des apports de phosphore et d’azote dans les eaux de surface reste aujourd’hui la seule façon durable de protéger et/ou de restaurer ces écosystèmes vis-à-vis des proliférations de cyanobactéries planctoniques.   

Les proliférations de cyanobactéries benthiques sont quant à elles rencontrées le plus souvent dans des eaux courantes peu profondes (rivières et certains grands fleuves). Les connaissances actuelles sur ces proliférations sont beaucoup plus restreintes que pour les cyanobactéries planctoniques.

Il semble cependant que les développements de plaques (ou biofilms) de cyanobactéries surviennent préférentiellement lorsque le niveau des cours d’eau est au plus bas, dans des zones de profondeurs inférieures à 1 mètre et présentant un faible courant. Le décrochage de ces plaques, leur transport puis leur accumulation sur les rives résultent de divers processus encore mal connus.

Les facteurs et processus régulant les proliférations de cyanobactéries étant particulièrement complexes, ces phénomènes sont souvent difficilement prévisibles.

Comment éviter des intoxications ?

Dans les zones de développement et d’accumulation de cyanobactéries, il est recommandé de :

  • éviter les activités nautiques (baignade, ski nautique, aviron, canoë, paddle…) ;
  • surveiller les jeunes enfants pour éviter que ceux-ci jouent avec les amas de cyanobactéries accumulées en surface, sur les rives, les pierres et les cailloux en bordure de plans d’eau et de cours d’eau ;
  • tenir les chiens en laisse pour ne pas les laisser accéder aux plans et cours d’eau ;
  • en cas d’apparition de signes cliniques suspects (tels que gastro-entérite, démangeaisons, rougeurs, conjonctivite, vertiges, altérations des sensations) consécutifs à une exposition avec de l’eau contaminée lors d’une baignade ou d’une activité nautique, prendre une douche et consulter son médecin.

De manière générale, concernant la consommation des poissons d’eau douce :

  • étêter et éviscérer les poissons avant de les consommer (ou avant de les congeler) ;
  • ne pas consommer entiers les petits poissons d’eau douce (fritures) ;
  • limiter au maximum la consommation de poissons en provenance de milieux régulièrement concernés par des proliférations de cyanobactéries.

Le changement climatique a-t-il un impact sur leur prolifération ?

L’impact du changement climatique sur les proliférations de cyanobactéries est actuellement discuté dans la communauté scientifique. L’augmentation globale des températures, mais également les modifications des régimes pluviométriques (multiplication de périodes de grandes sécheresses, épisodes de tempêtes et de pluies violentes…) provoquent des modifications dans le fonctionnement des plans et des cours d’eau. Ces modifications semblent favoriser les proliférations de cyanobactéries. Cependant, les interactions entre tous ces facteurs et processus sont multiples et encore largement méconnues. Il est donc très difficile de prédire quels seront réellement leurs impacts sur les proliférations de cyanobactéries.

Les travaux de l'Anses pour accroître le niveau de connaissances des microcystines

Pour limiter l’exposition des usagers aux cyanobactéries, l’Anses :

  • actualise la liste des cyanobactéries productrices de toxines en eau douce présentant un danger pour les humains ;
  • construit des valeurs toxicologiques de référence pour plusieurs cyanotoxines permettant ainsi de caractériser le risque sanitaire pour les usagers et déterminer les seuils de gestion ;
  • propose des éléments d’éclairage pour améliorer la prise en compte et la gestion du risque des cyanotoxines pour les différents usages de l’eau (eaux destinées à la consommation humaine, eaux de loisirs, eaux destinés aux activités de pêche, etc.) ;
  • mène différents travaux de recherche :
  • dans son laboratoire de sécurité des aliments : des investigations sur les cas d’intoxications alimentaires ;
  • dans l’unité de Toxicologie des contaminants du laboratoire de Fougères : des études pour évaluer le devenir des toxines et leur toxicité après ingestion ;
  • dans son laboratoire d’Hydrologie : des travaux pour normaliser les méthodes de prélèvement, de détection et de quantification des cyanobactéries. L’objectif est de fournir aux laboratoires agréés par le Ministère de la Santé des méthodes partagées par tous afin d’assurer une surveillance sanitaire homogène sur l’ensemble du territoire français 

De manière générale, des travaux visant à accroître le niveau de connaissances des microcystines pour permettre une meilleure évaluation des risques liés à ces molécules.

Avis et rapports en lien avec l'article

Document PDF
Évaluation des risques physico-chimiques dans les aliments
Date de mise en ligne
17/07/2008
Numéro de saisine
2007-SA-0219