Eau Développement durable

Prévenir les risques sanitaires liés à la présence de substances chimiques dans les eaux destinées à la consommation humaine

Les eaux destinées à la consommation humaine (EDCH) peuvent contenir diverses substances chimiques d’origine naturelle et/ou anthropique. À la demande du ministère chargé de la santé, l’Anses évalue les risques sanitaires liés à la présence de ces substances, dans les eaux destinées à la consommation humaine. Pour protéger au mieux le consommateur, elle appuie en particulier les autorités en cas de dépassement des limites réglementaires.

Qu’appelle-t-on les eaux destinées à la consommation humaine et d’où proviennent-elles ?

Les eaux destinées à la consommation humaine (EDCH) comprennent les eaux du robinet et les eaux conditionnées, majoritairement en bouteilles, à l’exception des eaux minérales naturelles. Elles sont produites essentiellement à partir d’eaux souterraines et/ou de surface dites « brutes », qui sont traitées pour être rendues potables. Les EDCH sont soumises à une réglementation spécifique.

Quelles sont les sources de contamination chimique des eaux destinées à la consommation humaine ?

Selon le milieu d’où elles proviennent, ces eaux peuvent contenir des éléments minéraux d’origine naturelle (fluor, magnésium, calcium…) dont certains peuvent présenter une toxicité avérée pour l’Homme, à l’instar de l’arsenic. Les ressources en eau peuvent être par ailleurs l’objet de contaminations résultant des activités humaines urbaines, industrielles, agricoles ou de contaminations accidentelles.

Comment sont réglementées les substances chimiques présentes dans les eaux destinées à la consommation humaine ?

Afin de protéger la santé des consommateurs, la présence des substances chimiques est encadrée par la réglementation européenne traduite en droit français dans le code de la santé publique. Basée sur les travaux de l’Organisation Mondiale de la Santé, cette réglementation fixe notamment, par l’arrêté du 11 janvier 2007 modifié, des concentrations maximales pour une quarantaine de substances chimiques ou familles de substances chimiques dans l’eau distribuée au consommateur. Ces concentrations maximales sont de deux ordres :

  • d’une part, les « limites de qualité » qui sont fixées pour protéger la santé du consommateur ;
  • d’autre part, les « références de qualité » qui sont fixées pour vérifier le  bon fonctionnement des stations de traitement de l’eau ou éviter une altération des propriétés organoleptiques, c’est-à-dire de la couleur, de l’odeur ou du goût de l’eau distribuée et in fine protéger la santé du consommateur.

Un contrôle régulier de la qualité des EDCH et du respect des exigences de qualité est assuré par les Agences régionales de santé (ARS).

Le saviez-vous ?

La directive UE 2020/2184 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine est la révision de la directive 98/83/CE relative à l’eau potable datant de 1998. Elle sera transposée en droit français dans les deux ans suivant sa publication.

Les concentrations maximales réglementaires des substances chimiques dans les EDCH peuvent-elles être dépassées ?

La gestion des situations de non-respect des exigences de qualité des eaux distribuées au robinet est très encadrée par la réglementation qui prévoit en particulier la possibilité d’un dépassement des limites de qualité, à titre dérogatoire, sous réserve que :

  • le dépassement soit temporaire et sans danger pour la santé ;
  • il n’est pas possible de mettre en œuvre des mesures correctives immédiates comme le traitement, le changement de ressource ou la mise en œuvre d’interconnexions par exemple afin de maintenir la distribution d’une eau conforme aux limites de qualité ;
  • des mesures soient prises par les autorités sanitaires locales pour rétablir la conformité de l’eau distribuée dans les délais impartis ;
  • soit fixée et appliquée une valeur limite dérogatoire ou « valeur guide » assurant le respect de la santé publique pendant cette période.

Comment ces situations de dépassement sont-elles gérées ?  

Afin d’appuyer les autorités sanitaires dans la gestion de ces situations de dépassement dans les EDCH, la Direction générale de la santé a saisi l’Agence afin d’évaluer, pour une série de substances chimiques, les risques sanitaires liés à la consommation d’eau dont la concentration serait supérieure aux limites ou aux références de qualité. L’Agence a ainsi déterminé, pour seize substances, sur la base de considérations sanitaires, des concentrations maximales admissibles pour la consommation d’eau de boisson durant toute la durée des dérogations. C’est ce qu’on appelle les « valeurs guides ». Ces travaux ont été publiés dans un rapport de 2007 (PDF). Depuis, les travaux d’expertise se sont poursuivis et de nouveaux avis ont été publiés pour les substances suivantes : bromates (PDF), chrome (PDF), bore (PDF), manganèse (PDF). De plus, afin de tenir compte de l’évolution des connaissances scientifiques, certains paramètres, qui avaient fait l’objet d’avis publiés dans le rapport précité, ont été actualisés, à l’image du sélénium (PDF) et du chlorure de vinyle (PDF).

Dans certains cas, faute de données suffisantes, il n’est pas possible de proposer une valeur guide.

Ainsi, sur la base des avis de l’Agence, les pouvoirs publics peuvent prendre des mesures de gestion adéquates : amélioration de la qualité de l’eau de la ressource, mise en place de traitements pour l’EDCH ou de mélange des eaux par interconnexions de réseaux, restriction des usages de la consommation d’eau du robinet, etc. - pour gérer au mieux les situations ponctuelles de dépassement des exigences réglementaires et assurer un retour à la conformité.

Qu’en est-il des substances chimiques non réglementées présentes dans les EDCH ?

Au-delà de la surveillance des 40 substances réglementées, les services en charge de la qualité des EDCH exercent une vigilance sur la possible présence dans ces eaux d’autres substances. Cette vigilance passe notamment par l’organisation de campagnes prospectives dans les EDCH. De plus, au niveau national, le laboratoire d’hydrologie de Nancy de l’Anses mène régulièrement des études exploratoires concernant la détection de certaines de ces substances dans les eaux utilisées pour produire de l’EDCH et dans les eaux traitées, comme les acides haloacétiques, les chlorates et phtalates (PDF) ou encore les composés alkyls perfluorés (PDF).

L’Agence est depuis plusieurs années régulièrement interrogée sur les risques sanitaires liés à la détection dans l’EDCH de substances pour lesquelles aucune limite ni référence de qualité n’est fixée sur le plan réglementaire, à l’image des résidus de médicaments (PDF) ou du perchlorate. Dans ce cas, les avis de l’Anses visent à fournir une valeur guide dans les eaux de boisson pour la substance chimique identifiée. Cette valeur permet ensuite aux pouvoirs publics de déterminer la concentration à partir de laquelle des actions doivent être mises en œuvre : information du public, restriction de consommation, actions de remédiation, etc.

Ces évaluations de risques sanitaires pour des substances non réglementées peuvent concerner des situations locales particulières de contamination naturelle comme le thallium (PDF), industrielle à l’image du N-nitrosomorpholine (PDF) et de la morpholine (PDF) ou accidentelle comme le trinitroglycérol (PDF) rejeté suite à l’incendie d’un entrepôt.

Comment sont élaborées les valeurs guides pour les substances chimiques dans les eaux de boisson ?

Que les expertises concernent des substances chimiques réglementées ou non, l’élaboration d’une valeur guide repose toujours sur deux étapes principales :

  • la caractérisation du danger pour la santé humaine de la substance chimique conduisant à la détermination d’une valeur toxicologique de référence ;
  • la caractérisation de l’exposition de la population à la substance chimique à partir des eaux de boisson, qui se base sur les concentrations mesurées dans les EDCH et sur la prise en compte des autres sources d’exposition de l’Homme, en particulier l’alimentation. 

En complément, les avis de l’Anses documentent les capacités d’analyse de la substance dans les eaux de boisson et les possibilités de traitement pour diminuer sa concentration dans l’eau. En pratique, l’évaluation des risques sanitaires liés aux substances chimiques dans les EDCH est généralement menée en comparant les concentrations mesurées dans les eaux de boisson avec la valeur guide déterminée pour ladite substance chimique.

Cette méthode d’élaboration des valeurs guide pour les substances chimiques dans les EDCH est décrite dans le rapport de 2007. Ce guide méthodologique fait l’objet d’une actualisation dans le cadre d’une auto-saisine de l’Agence

Le saviez-vous ?

L’ensemble de ces travaux, portant aussi bien sur les substances réglementées que sur les substances émergentes, ont permis d’étayer la position de la France vis-à-vis de la refonte de la directive européenne 98/83/CE relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (cf. note du 23 mars 2018 révisée (PDF)).